"Pas étonnant qu'elle soit aussi grosse"

Titre accrocheur n'est-il pas ? Combien de fois l'a t-on pensé quand on voyait une personne en sur-poids rentrer dans un McDonald's ou se prendre des bonbons, des pâtisseries ou des pizzas au supermarché ? Tout le monde se l'a déjà dit, tout le monde sans quasi exception.
La raison de ce billet est que cette phrase a été prononcée à mon encontre dernièrement et cela m'a fait réfléchir.

Effectivement, je ne suis pas mince. J'ai été bien "proportionnée" (car c'est de cela qu'il s'agit) à une époque où je faisais plusieurs heures de danse classique par semaine. Et j'ai pris du poids ces dernières années. J'aime manger. J'aime autant les pizzas, la charcuterie, le McDonald's que le bœuf bourguignon, la tartiflette et que les légumes, les plats raffinés voire diététiques. Bref, j'aime tout, je mange de tout. Je ne m'en cache pas et ne m'en suis jamais cachée. Je sais que je suis plus salé que sucré (il y a quelques mois c'était l'inverse) et que quand je suis contrariée ou énervée, je mange en quantité. Je ne m'en cache pas et ne m'en suis jamais cachée.

Pour vous donner une idée, et parce que je n'ai pas honte de moi, je mesure 1m55 et je pèse 72 kg ce qui me donne un IMC (indice de masse corporelle correspondant à votre poids en kg divisé par votre taille en mètre au carré) de 30 signifiant que je suis entre le sur-poids et l'obésité modérée. Je n'ai jamais caché mon poids à qui que ce soit, si on me demande, je réponds, je n'en n'ai pas honte, je m'assume.

Alors le problème et là où je veux en venir, c'est que l'on juge sans connaître. Oui cette personne nous semble "grosse" alors pourquoi elle va à McDo ? Oui cette personne nous semble en sur-poids alors pourquoi elle achète des bonbons, pourquoi elle mange autant de pâtisseries ? La question du pourquoi ne regarde qu'une seule personne : celle montrée du doigt. Si vous êtes conscient des "risques" que vous encourrez en mangeant ces "cochonneries" qui font tellement de bien alors vous faites les choses en votre âme et conscience. Qui est-ce que ça dérange à part la personne dite "grosse" qu'elle mange deux Big Mac ? Personne, nous sommes d'accord. Certain diront que c'est pour leur bien qu'on leur dit qu'ils sont gros ou en sur-poids. Non, c'est faux. En jugeant sans savoir les tenants et les aboutissants, on se rassure nous même et on assouvit notre besoin de voyeurisme et de morbidité.

Oui, car l'être humain est ainsi fait (plus ou moins selon les personnes). On aime à voir le malheur, la détresse des autres pour se rassurer sur notre propre condition. On aime s'arrêter sur le bord de la route quand il y a eu un accident, pas parce qu'on veut s'assurer que personne n'a été blessé (on s'en fiche, on ne connait pas ces gens) mais parce qu'on a un besoin à assouvir, un besoin primaire que personne n'ose s'avouer : voir le malheur des autres nous fait du bien. Et il en a toujours été. Pourquoi croyez vous que les émissions de télé réalité fonctionnent autant ? On prend des archétypes poussés à l'extrême et on élimine ceux qui "sont trop cons", "trop moches", "trop gros".... Et le paradoxe est que de la même façon que la détresse des autres nous fascine, elle nous repousse en même temps. Mais avouez, l'adrénaline du dégoût est fascinante non ?

Alors rassurez-vous, je ne suis pas au dessus de vous. J'ai aussi ces besoins primitifs et répugnants sauf que j'arrive à les identifier et à me résonner de temps en temps. J'ai ces réactions comme vous tous : "mais qu'il est con, il connaît même pas ceci", "mais qu'il est moche, c'est pas humain d'être aussi laid", "mon dieu, elle est énorme, c'est horrible". Oui j'ai ces réflexions également mais j'arrive à me dire que je n'ai pas réfléchit, pensé et construit ma réflexion. Donc je n'en fait part à personne.

Vous trouvez ça horrible ce que je raconte ? Mais sachez que nous sommes tous des monstre...